6 days before D-Day #Foxpleasure

One souvenir per day, 6 days until D-Day.

1988-2002

I remember DIE HARD. No need to stress how new and fresh it was – the hero is fun, brave, and he suffers. As I finally went to Los Angeles years later, how many times did I check if the Nakatomi Plaza, aka Fox Plaza, was still up at Century City ? Later, I remember and enjoyed DIE HARD WITH A VENGEANCE, a Touchstone picture (Disney). On the Fox lot, there is this huge DIE HARD poster. And you can hear John McClane whispering « Yippee Ki Yay ».

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I remember 24, the real-time intrigue, the split-screen design and the music (still my ringtone 2 decades later). I had to buy DVDs in the UK to binge the full series. I remember that short video of Kiefer Sutherland that Mark Kaner managed to have produced and sent for Canal+ 15th anniversary. That same year, I remember the first Ice Age, with Rudy and Manny.

7 days before D-Day

For any Fox or Disney employee, D-Day refers to this coming March 20, 2019 when Disney becomes the owner of some 21CF’s assets. As a new era will soon begins, there is obviously a mix of sadness, nostalgia, hope and enthousiasm. The exact balance between these feelings may vary from one person to another, but we’ll all remember Fox legacy.

I personally remember hundreds of moments, first as a Fox fan, then a Fox partner, and finally a Fox employee. Here is a sequence of souvenirs, one souvenir per day, 7 days until D-Day.

*** 7 days before D-Day ***

1977-2005

I don’t remember when I saw STAR WARS for the first time. But I recall my emotions. The STAR WARS franchise became a universe with whom I grew and that still lives my adult life. I remember this young kid sitting next to me at the premiere of Star Wars: Episode III – Revenge of the Sith. While the end credits scrolled on the screen, he exclaimed whispering, « Luke and Leia are brother and sister ! » How lucky was he ! He had 3 more films from the franchise to discover.

 

Comment Netflix capte le public jeune

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Le service public audiovisuel français a lancé Culture Prime à l’automne dernier, une initiative qui vise à proposer des vidéos courtes et culturelles à destination du public jeune, sur les réseaux sociaux. Elle s’ajoute notamment au lancement de France TV Slash (dont la saison 3 de SKAM vient de débuter), portée par France Télévisions, et au projet Salto porté par TF1, France Télévisions et M6.

Comment capter les jeunes ? La question est centrale pour les diffuseurs, au fur et à mesure que le public télévisuel vieillit. Il y a urgence : en France, la durée d’écoute télévisuelle des 15-34 ans a encore chuté de 20 minutes en octobre : 1 heure 50 contre 2 heures 08 en octobre 2017, alors qu’elle est stable, à plus de 5 heures quotidiennes, pour les plus de 50 ans. Et les GAFAN (avec un N comme Netflix…) se disputent, avec n’importe quel « contenu », sur n’importe quel écran, ce public des moins de 40 ans. C’est le cœur de la publicité comme de l’abonnement audiovisuel de demain.

Les plateformes de streaming s’adressent même prioritairement à cette cible. Le constat s’aggrave. Prenez le leader, Netflix : sur ses 73 séries originales proposées en France, la moitié cible adolescents et jeunes adultes via leurs thèmes, genres ou héros. En sus des productions Marvel, Netflix est aussi le diffuseur des séries diffusées aux Etats-Unis par la chaîne CW, avec quelques fleurons des rivaux DC Comics (Flash, Supergirl, Arrow) ou Archie Comics (Riverdale, Sabrina). Enfin, les nouveaux projets de fiction française du géant américain affichent tous le même prisme générationnel sur des genres variés – horreur, science-fiction, romance adulescente ou comédie décalée – mais traités à la marge par la fiction nationale. Netflix semble absorber toutes les séries signifiantes pour cette cible juvénile délaissée par les diffuseurs historiques.

Culture juvénile. L’américain a aussi créé un service techniquement sur-mesure pour les jeunes générations, disponible sur tous leurs écrans mobiles et que l’on partage avec simplicité et sans contrôle. Non sans risque. La multiconnexion, familiale ou pirate, a pris une ampleur inédite, surtout chez les jeunes : un tiers des utilisateurs de vidéo à la demande sur abonnement (SVOD) âgés de 15 à 35 ans profiteraient d’un abonnement qui n’est pas le leur (13 % pour les baby-boomers). Public boulimique, pouvoir d’achat contraint.

Mais ce ciblage générationnel est sacrément efficace : Netflix trône en tête de la plupart des classements des marques préférées des millenials. Les « streamers » ont gagné cette première bataille de l’attention en ligne. Plus largement, en France, d’après Médiamétrie, les utilisateurs quotidiens de SVOD, soit 3 millions d’individus, ont 31 ans en moyenne.

Il est donc urgent de relire et d’actualiser la formidable étude conduite par l’Insee et le ministère de la Culture sur les pratiques culturelles des Français depuis 1970 : les effets de générations sont réels. La « culture juvénile » se renforce au cours du temps car les générations conservent en grande partie les comportements et préférences de leur jeunesse. Projetons-nous dans une dizaine d’années : certains diffuseurs auront du mal à convaincre demain les générations délaissées aujourd’hui, d’autres pas.

Le choc numérique d’aujourd’hui pourrait être le prélude à un choc culturel plus grave encore plus tard.

 

(Chronique initialement publiée dans l’Opinion)

La guerre du streaming est déclarée.

Il règne une curieuse atmosphère à Hollywood. Il y a d’abord cette préparation générale pour une nouvelle bataille sur le terrain de la distribution audiovisuelle. Face à Netflix et Amazon, cette consolidation gigantesque se poursuit et interroge tout un secteur. Comcast, qui possède Universal Studios, tente de ravir Sky à Fox. Disney se prépare à absorber les actifs internationaux de Fox et la majorité de Hulu pour se déployer face à Netflix. ATT digère Warner et sa filiale HBO depuis le feu vert obtenu des autorités américaines en juillet. Unique (Netflix) ou hybride (Hulu, Amazon), les modèles du streaming sont et seront multiples.

Du côté de la production audiovisuelle, tous les plafonds sont dépassés cette année encore. Environ 525 saisons nouvelles de séries seront lancées en prime time sur les écrans américains, TV et streaming compris. C’est encore 10 % de plus que l’année précédente. Le seuil de « Peak TV » n’a pas été franchi, contrairement à quelques prédictions : le volume de production de séries ne cesse de progresser, l’argent coule à flots, ni l’imagination ni les budgets n’ont de limites. Cependant, Hollywood s’interroge sur les possibilités d’une surchauffe, voire d’une bulle. On craint la « gueule de bois ». Le moment de vérité viendra, mais quand ?

Le moteur de cette croissance exponentielle est évidemment le développement du streaming payant – Netflix (8 milliards de dollars), Amazon (5 milliards), AT&T qui vient de racheter Warner et donc HBO, et bientôt Disney pour n’évoquer que les géants. Mais aussi Apple (1 milliard), Facebook et YouTube. Les sommes investies dans l’acquisition de talents et le développement d’histoires originales excèdent très largement les revenus générés par cette activité. Mais les actionnaires misent sur l’avenir, et l’acquisition d’une base d’abonnés suffisamment massive et mondiale pour que les opérateurs rehaussent les prix des abonnements et deviennent enfin rentables. Le patron de la chaîne FX déclarait récemment qu’il ne voyait stratégiquement pas d’autre issue à sa marque que de s’affilier à l’un des géants (en l’occurrence, Disney).

Inquiétude nationale. Cette consolidation est d’abord un défi technique : une taille mondiale procure un avantage technologique décisif sur l’enrichissement de l’expérience utilisateur, de la publication et de l’animation des programmes. Les services de Netflix et consorts placent ainsi haut la barre pour leurs concurrents. Et définissent désormais le standard du marché.

Cette consolidation interroge aussi les opérateurs locaux, notamment en France sur la question des droits de diffusion. Comment conserver l’exploitation des programmes nationaux qu’ils financent pour éviter le cercle vicieux de laisser enrichir des plateformes mondiales qui à leur tour les concurrencent ? C’est l’un des défis, le plus sérieux car il heurte la réglementation actuelle en France qui limite cette intégration verticale, et les producteurs et distributeurs indépendants qui ont besoin de financements complets et de perspectives de recettes futures sur leurs créations. Pourtant, cette absence d’intégration verticale nourrit une concurrence étrangère qui en retour fait pression sur le système de quotas nationaux.

Cet article a été initialement publié par l’Opinion le 27 septembre 2018

Féminisme

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Une amie m’a questionné sur mon obstination féministe. En retombant sur cet album de Renaud, j’ai déroulé le fil d’une histoire finalement banale.
Le féminisme d’un garçon vient d’abord de sa famille. L’environnement familial, paternel comme maternel, a influencé, nourri, fait grandir cette évidence que les inégalités femme/homme sont du sexisme et de l’oppression.

Il y a aussi ce malaise plus intime devant l’injonction masculiniste virile et bête, moins présente aujourd’hui en Occident, mais encore très forte au début des années 80. Le personnage du beauf du regretté Cabu est un bel exemple.

Il y a ensuite la confrontation au réel: la rare inégalité que j’ai pu constater quotidiennement – et partout, dans tous les milieux, toutes les situations de vie – fut cette oppression des femmes par les hommes. Quand #MeToo et #BalanceTonPorc sont arrivés, j’ai eu le sentiment que quelqu’un avait enfin allumé la lumière dans la pièce de nos vies: le sexisme domestique, professionnel, ou politique est partout.

Il y a ensuite les deux femmes les plus proches de ma vie, ma femme et ma fille. La résistance de la première, le stress paternel qui m’a envahit au plus profond de mes tripes quand la seconde est née, puis quand elle a grandi au point d’intéresser certains regards lubriques qui naturellement m’ont enragés. Je ne suis plus inquiet car elle sait se défendre mieux que je ne pourrais jamais le faire. La scène qui suit de True Romance a remplacé celle de Liam Neeson dans Taken menaçant de mort le kidnappeur de sa fille.

Revenons à cet album, le plus féministe de Renaud, avec cette ode aux femmes, Miss Maggie, et ce désarroi paternel exprimé dans Mistral Gagnant. Le retrouver dans le placard familial m’a ouvert les yeux sur ce chemin.

Joyeux Noël.

 

 

 

Netflix est-il l’ennemi des salles de cinéma ?

Alors que le dernier film des frères Coen sort … sur Netflix ce 16 novembre… interrogeons-nous.

Les films de Netflix avaient été disqualifiés de sélection cannoise : « Désormais, tout film présent en compétition devra sortir dans les salles françaises », expliquait Thierry Frémaux, le délégué général du Festival de Cannes, dans Le Film Français en mai dernier. Certains ont critiqué cette décision. Dans le sempiternel débat français sur la chronologie des médias, cinq organisations se sont élevées contre la possibilité qu’un film de cinéma conserve son statut (et ses financements) sans qu’une sortie en salles ne soit requise en France.

On aurait tort de caricaturer ce débat à celui des anciens contre les nouveaux, à le résumer à un quelconque caprice de supériorité des salles de cinéma sur les nouveaux médias. La sortie en salles de cinéma incarne, sans doute encore pour longtemps, la différence entre le film et le téléfilm. Steven Spielberg l’explique très bien : « Dans les faits, quand on se soumet au format télévisuel, on devient un téléfilm. Le cinéma est un lieu de liberté. Il n’y a rien de péjoratif à rappeler que la fiction télévisuelle, toute créative soit-elle, est d’abord soumise aux impératifs d’un ou deux diffuseurs au mieux. Malgré toutes les difficultés qu’un cinéaste peut rencontrer, il jouit d’une liberté plus importante que celle d’un créateur de fiction télévisuelle : les diffuseurs TV ont un pouvoir de censure, mais aucun n’a le dernier mot.

Un temps, Netflix et les autres ont été loués pour l’incroyable liberté que les créateurs y trouveraient par rapport aux diffuseurs traditionnels. Ce temps est révolu. Netflix comme Amazon ont annoncé l’arrêt de certaines de leurs séries. Ils agissent comme…les diffuseurs qu’ils sont. Ce droit de vie ou de mort n’est que la règle du jeu audiovisuel.

La conversation sociale s’éparpille.

La seconde question qui pourrait opposer Netflix au cinéma est son financement. Le cinéma laisse une place à l’exploitation de ses différents diffuseurs. La SVOD est trop gourmande pour ne pas bousculer cet équilibre. En France, les pouvoirs publics tentent d’attirer les services non-linéaires à contribuer au financement en échange d’une meilleure place dans la chronologie d’exploitation. Pourtant, il est difficile d’imaginer que des géants tels Netflix ou Amazon changeront leur modèle pour notre seule régulation nationale.

Netflix est-il pour autant l’ennemi des salles obscures ?

Pour certains, l’accès à de larges catalogues de fictions, notamment de séries, est en passe de dégoûter une part croissante du public, jeune en particulier, du spectacle en salle. Le producteur français Pascal Breton, président de Fédération Entertainment, confiait récemment : « la série devient le média de tous les médias. Elle en ringardise même le cinéma ». Le cinéma est depuis longtemps l’objet de chroniques sur sa mort. Pourtant, qui n’a pas eu l’impression d’une overdose de séries ? Le nombre de séries proposées au public dépasse chaque année ses propres records. La conversation sociale s’éparpille, chaque série est chassée par une autre. Et les algorithmes achèvent d’enfermer chaque spectateur dans ses propres goûts. Le cinéma connaît moins ces difficultés. Un film prend moins de temps culturel. Le phénomène de « Peak TV » devrait au contraire conforter la place de l’œuvre unitaire.

 

 

(Chronique publiée le 9 avril 2018 dans l’Opinion)

«La disparition de la télévision?» (REPLAY)

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Aux Etats-Unis, la chute du nombre d’abonnés aux offres télévisuelles « multichaînes » est l’objet de sempiternelles chroniques. C’est le fameux « cord-cutting », qui désigne le renoncement à l’abonnement à ces offres par câble ou satellite. On compte encore 92 millions de foyers abonnés, mais ces derniers ont chuté de 8 millions en cinq ans (source, Kagan 2018). Pour des observateurs trop expéditifs, le cord-cutting incarne « la fin de la télévision », au profit du streaming, moins cher et plus souple tels Netflix, Amazon et consorts.

Nouvelle de l’été dernier, ce cord-cutting s’essouffle ! La chute des abonnements à la télévision américaine se fait moins forte que prévu, 478 000 abonnés perdus au second trimestre 2018, contre 800 000 à un million en moyenne les trimestres précédents. Le « miracle » tient à la réintégration dans les statistiques des mini-bouquets Internet Sling TV (Dish Network) et Directv Now (AT&T). Leurs progressions sont réelles et croissantes, les deux services comptent environ 8 millions d’abonnés désormais.

Mieux, ces données sont encore incomplètes car quelques mastodontes récemment entrés sur le marché de la distribution de chaînes de TV ne communiquent pas leurs résultats : Hulu, YouTube TV et Amazon proposent à leur tour des abonnements à des chaînes en direct, via Internet.

Certes, ces mini-bouquets sont moins chers, donc moins rémunérateurs, que les abonnements d’antan (de 25 à 50 dollars, plutôt que 100 ou davantage). Pour les opérateurs historiques (AT&T, DishNetwork) ou récents (Hulu, Amazon), l’équation peut être quand même rentable : la structure des coûts de distribution est très différente ; les frais d’installation et de gestion d’un abonnement 100 % numérique sont en effet très inférieurs aux services traditionnels qui reposaient sur une infrastructure et un niveau de prestation « physique » conséquents. Du coup, les marges des opérateurs, au fur et à mesure que le portefeuille d’abonnés progresse, ne seront pas si négligeables.

Cord-never.

Mais pour les éditeurs de chaînes, est-ce le salut ? Pas vraiment. Ces mini-bouquets Internet sont aussi « mini » par le nombre de chaînes proposées (60 à 130). Il n’y a pas de place pour tout le monde. Les gros perdants sont cette multitude de chaînes aux marques trop faibles ou aux programmes peu indispensables. Au second trimestre 2018, 90 % des chaînes nationales ont perdu des abonnés. Certaines chaînes n’ont pas sécurisé tous les droits de streaming. Ainsi PBS, chaîne publique, n’est pour l’instant pas distribuée dans ces nouveaux mini-bouquets pour des motifs de droits…

Et ce n’est pas tout : environ 9 % de la population américaine, une fraction croissante, n’a jamais pris d’abonnement traditionnel. Cette génération de « Cord-Never » est jeune, 34 ans environ. Elle a été habituée à ne jamais payer en utilisant le compte parental, puisque les offres audiovisuelles numériques proposent désormais plusieurs accès à leurs services TV dans le même abonnement.

En France, la distribution télévisuelle tient grâce aux offres « triple play » (TV, téléphone, Internet). Pour combien de temps ?

 

(Chronique publiée le 27 août 2018 dans l’Opinion)

(REPLAY) Demain, tous prisonniers des algorithmes?

 

Il y a un sujet commun aux économies de l’Internet et de la culture qui intéresse enfin au-delà du cercle des professionnels initiés : les algorithmes. La manipulation de l’information à l’occasion de l’élection présidentielle américaine par les algorithmes de certains réseaux sociaux a choqué. Mais depuis deux ans, les professionnels de l’audiovisuel français s’intéressent aussi aux risques posés par ces mêmes dispositifs dans l’offre audiovisuelle.

Il y a longtemps, chacun pouvait se sentir prisonnier de sa situation sociale, de sa culture familiale ou acquise, ou de sa situation géographique. La massification de l’accès à la culture, grâce au numérique, avait créé beaucoup d’espoirs. On a cru alors que les algorithmes remplaceraient les directeurs des programmes des diffuseurs traditionnels, qu’ils seraient le compagnon indispensable de cette libération de l’accès. L’arrivée de Netflix en Europe fut ainsi l’occasion de commentaires parfois béats sur sa recommandation personnalisée et automatisée.

Qui pourrait se plaindre de se voir offrir les programmes correspondant le mieux à ses goûts et ses envies ? Pourtant, force est de constater que les algorithmes ont fini par doucher ces espoirs d’accès illimité et de découverte facile.

Les algorithmes posent d’abord des questions sur le respect de la vie privée : comme pour les réseaux sociaux, ils s’appuient sur des données personnelles. Par exemple, Netflix personnalise jusqu’aux visuels des programmes qu’il fait apparaître sur la page de recherche de ses abonnés sur la base d’un enregistrement systématique de nos consommations.

Un algorithme trop puissant se doit d’être déloyal pour être efficace. C’est un paradoxe

Quotas de diffusion. Les algorithmes font aussi obstacle à l’un des piliers de la politique de soutien à la création européenne, les quotas de diffusion. Imagine-t-on un algorithme recommander 40 % de programmes français à chaque requête de son utilisateur ?

Ensuite, ces algorithmes enferment les spectateurs dans leurs goûts initiaux et leurs pratiques. Ces dispositifs, expliquait le CSA, « peuvent en partie déposséder les individus des choix qu’ils pourraient faire spontanément et ainsi réduire leur libre arbitre.» Le numéro deux du groupe TF1, Ara Aprikian devant la mission parlementaire d’information pour « Une nouvelle régulation de la communication audiovisuelle à l’ère numérique », rappelait fort justement que « la télévision s’adresse à tous. Elle favorise la cohésion sociale, quand les plates-formes numériques et les algorithmes sont dans une logique d’atomisation ».

Enfin, pour tout média audiovisuel, un algorithme trop puissant se doit d’être déloyal pour être efficace. C’est un paradoxe : primo, tout diffuseur qui se met à produire son propre contenu tente de convaincre ses spectateurs de le consommer en priorité. Secundo, rares sont les médias qui disposent de la profondeur du catalogue nécessaire à servir toutes les envies. En janvier 2017, le CSA avait ainsi publié un rapport sur le sujet, et l’on pouvait y lire combien ces algorithmes « portent l’empreinte des partis initialement pris par leurs développeurs. »

Cette « culture de l’algorithme », qui est une affaire de marketing, est l’une des irruptions les plus violentes de la loi de la demande dans cette économie de l’offre qu’est l’audiovisuel.

 

(Chronique publiée le 25 avril 2018 dans l’Opinion)

Pourquoi la vidéo à la demande par abonnement s’éparpille

Coup sur coup en quelques semaines de cet été 2017, voici Disney, Paramount et peut-être Fox (*) qui annonçaient des lancements de services de vidéo à la demande par abonnement propriétaires. Exit donc les partenariats lucratifs avec les Netflix et Amazon ?

Disney a surpris en déclarant lors de sa dernière communication financière qu’il n’entendait pas renouveler l’accord de distribution de ces films en première exclusivité avec Netflix. Viacom confirmait lancer un service en Scandinavie baptisé Paramount+, qui proposera des films inédits tels « Baywatch » ou « Transformers : The Last Knight », mais aussi des séries et émissions telles « South Park » et « Inside Amy Schumer ».

Les téléspectateurs pourraient se réjouir. Les premières réactions furent différentes. Cet éparpillement poserait un problème de choix : qui va s’abonner à 3 ou 4 services d’une dizaine d’euros mensuels chacun alors que Netflix ou Amazon proposent déjà une offre riche ?

La réalité est plus complexe.

Premièrement, aucun service de vidéo à la demande par abonnement n’a jamais été une vidéothèque exhaustive. La profondeur des offres varie puisque les ayants droit commercialisent différemment leur catalogue d’un pays à l’autre. Netflix, qui domine le marché occidental, a même réduit son approvisionnement externe, à fur et à mesure que ses productions originales prenaient de l’ampleur.

Deuxièmement, comment reprocher aux studios de chercher d’autres débouchés ? La SVOD provoque des ruptures inédites : elle offre un usage sans limite, sur une durée longue, auprès d’un nombre d’abonnés massif. Donc les perspectives de revenus « aval » se raréfient. Les plateformes mondiales ont aussi le culte du secret sur les usages réels ; leur taille impose des rapports de force défavorables dans les négociations ; parfois, leur centre de gravité économique est ailleurs, sans rapport avec l’audiovisuel qui n’est qu’un artifice. Développer son propre service est une déclaration d’indépendance, une envie de maîtriser une évolution inévitable plutôt que de la subir.

S’ajoute le durcissement du marché. En Europe, les diffuseurs télévisuels préfèrent favoriser des productions locales, de qualité incontestable, mais qui correspondent surtout aux audiences vieillissantes du petit écran. Or les productions américaines, plébiscitées en SVOD, font le plein d’un public plus jeune qu’il faut bien toucher.

Troisièmement, le téléspectateur cinéphile ou sériephile ne devrait pas désespérer. Le marché est suffisamment large pour que l’oligopole Netflix/Amazon soit pris à partie. La facture ne sera pas forcément plus élevée : la SVOD suit un modèle sans engagement, qui permet au spectateur d’aller et venir sans tout payer tous les mois. Elle est parfois couplée de façon indolore au sein d’offres payantes qu’elle enrichit sans surcoût.

Pour échapper à un nouvel oligopole, trouver de nouveaux débouchés, mieux connaître le public, ces services de compléments sont une nécessité.

 

Images Feux d'artifice
BonnesImages.com


Cette chronique a été publiée le 20 novembre 2017 dans l’Opinion.

(*) L’auteur de ces lignes s’exprime exclusivement à titre personnel. Aucun propos ni argument n’engagent 21st Century Fox, ni ses filiales ou actionnaires.

Le Titanic de l’audiovisuel européen

Avez-vous regardé l’épisode du Capitaine Marleau diffusé par France 3 le 3 octobre dernier ? Il y a de fortes chances… si vous avez plus de 50 ans, comme les trois quarts de l’audience de cette série ce soir-là. Son succès est indiscutable. Il a surpris les observateurs : plus du quart des téléspectateurs présents devant leur poste regardaient la fiction de la Trois. Une semaine plus tard, face à un match de l’équipe de France de football qualificatif pour la prochaine Coupe du monde en Russie, le capitaine Marleau résiste encore.

La fiction française est faite pour qu’elle performe auprès de celles et ceux qui s’accrochent encore à la diffusion linéaire et programmée, un public plutôt âgé, qui vieillit avec elle. Les chiffres ne mentent pas. En septembre, les plus de 50 ans ont ainsi passé 5 heures par jour en moyenne devant le petit écran. C’est énorme, plus du double du temps passé devant le même petit écran par les moins de 35 ans. Bien servir ce public âgé est comme une bouée de sauvetage pour notre télévision nationale.

Cette stratégie est pourtant un cercle vicieux, et sans doute le meilleur chemin vers une dégringolade certaine. Nos chaînes nationales de télévision cherchent l’audience linéaire la plus importante. Cette audience est âgée. En lui donnant satisfaction, elles font fuir un public plus jeune qui n’en demande pas moins puisqu’ils ont d’autres distractions. Pire, cette audience âgée, par définition, vieillit d’année en année. Et donc, dans 5, 10 ou 15 ans, comment réussiront nos diffuseurs nationaux à convaincre une audience qui n’a jamais pris l’habitude de regarder ce que le petit écran historique lui a proposé dans sa jeunesse ?

Rattrapage. Car la chute de la consommation télévisuelle linéaire des plus jeunes est devenue massive. YouTube a 12 ans, Facebook cartonne en vidéo, Netflix frôle les deux millions d’abonnés dans l’Hexagone, la télévision de rattrapage s’est généralisée dans les foyers français après son lancement il y a dix ans. Il ne s’agit plus d’une curiosité adolescente, mais bel et bien d’une désertion massive qui concerne les moins de 35 ans dans leur ensemble.

Certains se rassurent : a priori, le danger n’est pas si grand. Nos plus jeunes regardent certes ailleurs mais ils ne font que regarder en différé ce que les plus vieux regardent en direct. Pour preuve, les statistiques américaines, toujours en avance sur nos mesures européennes : 50 % des Millenials regardent la télé, mais en différé. En France, les études sur le profil des audiences du replay sont balbutiantes. Les diffuseurs maîtrisent mal les données de consommation sur leurs audiences non linéaires.

Cette désertion de la diffusion linéaire par les moins de 40 ans pose pourtant déjà un double problème. A la différence des États-Unis, les chaînes françaises ne savent pas (encore) monétiser aussi correctement les écrans publicitaires sur leurs diffusions à la demande que sur leurs diffusions linéaires. Ce n’est plus le cas aux Etats-Unis où l’essor d’un Hulu, joint-venture entre 4 des 5 networks nationaux, touche justement la bonne cible publicitaire et génère des revenus plus significatifs que les dérisoires compléments publicitaires du replay français. Ensuite, les diffuseurs américains s’adressent réellement à tous les publics, tous les âges des nouveaux prime-time audiovisuels. Il n’y a qu’à observer la programmation européenne d’un Netflix, qui hérite en exclusivité de nombreuses fictions américaines délaissées par nos diffuseurs nationaux, pour s’en convaincre.

Cette chronique a été publiée dans l’Opinion le 12 octobre 2017.